La Maladie
Les syndromes d’Ehlers-Danlos (SED )sont des maladies génétiques rares, liées à une anomalie qualitative et quantitative du collagène. L’incidence précise des syndromes d’Ehlers-Danlos n’est pas parfaitement connue. La fréquence est estimée entre 1/5000 à 1/10.000 naissances avec une discrète prépondérance féminine.
Le collagène est le principal constituant du tissu conjonctif dont il constitue l’armature. On le retrouve au niveau des articulations, de la peau, des muscles, mais aussi au sein de la paroi des vaisseaux, du tube digestif, et de la plupart des organes intra abdominaux.
Formes les plus fréquentes
L’atteinte clinique se manifeste par une hyperlaxité articulaire, une hyperelasticité cutanée et une fragilité tissulaire. Plusieurs formes de la maladie existent. Treize types de SED ont été répertoriés (classification. 2017). Les plus fréquentes sont :
Les formes hypermobiles
qui se caracterisent par une hyperlaxité articulaire avec instabilité, touchant toutes les articulations . Entorses et luxations sont fréquentes pour des mouvements de faible amplitude. Toutes les articulations peuvent être touchées. La station debout prolongée, la marche peuvent être rendues très difficiles en raison d’instabilité de hanche du genou et du pied. Une arthrose secondaire à ces luxations peut se développer précocement. L’origine génétique n’est pas encore connue, mais la transmission se fait sur un mode autosomique dominant.
Les formes classiques
se caractérisent également par :
– Une hyperlaxité articulaire , moins importante, touchant également toutes les articulations
– Des plaies cutanées : très caractéristiques. La peau qui est anormalement fine et fragile se déchire pour des chocs minimes avec plaies béantes et cicatrisation longue et difficile. Les hématomes sont nombreux, parfois spontanés.
– De nombreux autres troubles existent, fonction de l’organe atteint. Troubles digestifs fréquents, troubles vésicaux, troubles tensionnels…
Le gène responsable de la maladie est connu, la transmission est autosomique dominante. Les douleurs chroniques ainsi que la fatigue chronique sont constantes dans les formes hypermobiles et classiques. Toutes ces formes altèrent la qualité de vie et ont aussi un retentissement sur la vie professionnelle ( difficulté et fatigabilité au travail voire impossibilité de travailler)
Les formes vasculaires
Le syndrome d’Ehlers Danlos vasculaire (anciennement type IV) est une maladie génétique rare (1 /150 000) à transmission autosomique dominante due à une mutation hétérozygote du gène COL3A, codant pour la chaine pro alpha 1 du collagène de type III. Or cette protéine est un déterminant essentiel dans la résistance mécanique des organes creux ou pleins que sont les artères, les veines, les intestins, la peau, le foie, la rate et l’utérus. Le type de mutation influence l’expression clinique de la maladie.
Le collagène de type III est particulièrement présent dans les vaisseaux (artères et veines), les intestins, la peau, l’utérus, mais aussi dans les poumons, le foie, la rate et les capsules articulaires
Sa transmission est autosomique dominante (non liée au sexe puisque le gène COL3A1 se situe sur le chromosome 2). La mutation du gène COL3A1 peut aussi survenir « DE NOVO » dans 50% des cas.
Comme la plupart des gènes, le gène COL3A1 est présent en 2 exemplaires dans notre génome. Il suffit qu’une seule des 2 copies soit défectueuse pour que la production de collagène de type III soit altérée et que la maladie soit possible.
Comment se manifeste-t-il et comment faire le diagnostic ?
Le plus souvent, il se manifeste dans l’enfance par un certain nombre de signes mineurs, en particulier des hématomes faciles et une certaine fragilité cutanée. La gravité de l’affection tient à la fragilité tissulaire et les patients sont prédisposés à la survenue de rupture spontanée vasculaire, digestive et utérine. Ces complications, rares dans l’enfance, touchent 25 % des patients avant l’âge de 20 ans, et 80 % avant l’âge de 40 ans.
La maladie se diagnostique le plus souvent à l’occasion d’une complication vasculaire ou digestive grave. Elle peut aussi être retrouvée lors d’une recherche génétique familiale, lorsqu’un des membres de la famille est atteint.
Le diagnostic est fondé sur un faisceau d’arguments cliniques, en particulier sur un aspect caractéristique du visage, une peau fine et transparente, des veines anormalement visibles, une tendance aux hématomes, et des complications vasculaires, digestives, et obstétricales chez les femmes. D’autres signes, tels une certaine fatigabilité et fragilité cutanée, un aspect prématurément vieilli des mains, des problèmes de subluxation de l’articulation temporo-mandibulaire, des varices précoces, une alopécie précoce, peuvent être observés. Ces anomalies sont classées en critères majeurs et mineurs (critères de Villefranche édités en 1997). En présence d’au moins deux critères majeurs, le diagnostic est fortement suspecté et une recherche de la mutation du gène COL3A1 est justifiée. Les critères de Villefranche de 1997 ont été réactualisés (classification de New York 2017) La réalisation d’un arbre généalogique peut permettre d’identifier des membres de la famille possiblement atteints, afin de leur proposer un diagnostic et un suivi.
L’analyse moléculaire directe (étude de l’ADN) permet de préciser l’anomalie au niveau du gène COL3A1 et permet un conseil génétique, voire un diagnostic prénatal pour la famille étudiée. Cette analyse génétique se fait à partir d’une prise de sang classique, et si nécessaire à partir d’un prélèvement buccal ou d’un prélèvement d’un tissu lésé. Si la mutation est présente, il faut la reconfirmer par un second prélèvement.
Traitement
II n’y a pas de traitement des causes de la maladie. Seuls les traitements des symptômes sont possibles.
– Dans les formes hypermobiles et les formes classiques des soins permanents de kinésithérapie, de mobilisation douce, de renforcement des muscles stabilisateurs, des massages, des attelles et gilets de contention limitent les douleurs et l’hypermobilité. La rééducation en piscine est indiquée ;
– La prise en charge spécialisée de la douleur est un point très important pour ces patients douloureux chroniques.
– La prise en charge des autres symptômes est nécessaire. La maladie est multi viscérale et nécessite une prise en charge pluridisciplinaire (gastro entérologue, neurologue, dermatologue..). Cela reste actuellement difficile car la maladie est méconnue.
– Les sutures des plaies nécessitent un soin particulier, et les fils doivent être laissés plus longtemps
– Les patients atteints de formes vasculaires sont pris en charge par des équipes spécialisées dans le CRMVR de l’hôpital Européen Georges Pompidou ou dans les 19 centres de compétences en France. Des bilans annuels leurs sont effectués. Une limitation de l’activité sportive intense (sport de compétition) est conseillée et un traitement anti hypertenseur est prescrit dès l’adolescence.
Actuellement les patients sont traités par des β-bloquants. Une nouvelle étude met en évidence le bénéfice de l’ajout d’Irbésartan, matin et soir, qui diminue le risque de rupture vasculaire et de survenue d’anévrisme (étude ARCADE, prochainement publiée).
Suivi spécialisé pour les SED
Le diagnostic et le suivi de ces maladies rares peut nécessiter un suivi en centres spécialisés. Il existe différents centres de référence :
– SED VASCULAIRES : Centre national de référence des maladies vasculaires rares, hôpital Georges Pompidou à Paris. Auxquels sont rattaches 19 centres de compétence au sein des CHU répartis dans toute la France
– SED NON VASCULAIRES ADULTES à l’ hôpital Raymond Poincaré de Garches .
– SED NON VASCULAIRES ENFANTS à l’ hôpital Necker-Enfants Malades.
Il y a aussi pour les Sed non vasculaires plusieurs centres de compétences.
Associations
- L’AFSED (Association Française des Syndromes d’Ehlers Danlos) regroupe les patients atteins de SED.
- VEDS France, nouvellement créée, est une entité qui dépend de l’AFSED et regroupe les patients atteins du SED vasculaire.
- L’ Association DAVID Aider la recherche est partenaire de l’AFSED pour certains programmes de recherche
Les fiches d’informations sur la maladie
- Une fiche d’information sur la maladie est diffusée par le CRMVR (Pr Mirault)
- Un flyer d’information sur la maladie pour une plus large diffusion du public
- La carte de soins et d’urgence est donnée à chaque patient porteur de la mutation du COL3A par le praticien du centre de référence ou du centre de compétence qui le prend en charge
Bibliographie
Nous avons sélectionné quelques articles parmis les plus récents :
- Aspects physiopathologiques du syndrome d’Ehlers-Danlos vasculaire (Pr Mirault, 2015) ;
- A multi-institutional experience in the aortic and arterial pathology in individuals with genetically confirmed Vascular Ehlers Danlos Syndrome (S Shallub et all. 2019) ;
- Assessment of arterial damage in vascular Ehlers-Danlos syndrome: A retrospective multicentric cohort (S Adams et raDiCo SEDV cohort team 2022) ;
- Audit of gastro intestinal manifestations in patients with LD and VEDS syndrome ;
- Diagnosis and management of vascular Ehlers-Danlos syndrome: Experience of the UK national diagnostic service, Sheffield (JM Bowen et all. 2023) ;
- Genetic Basis, New Diagnostic Approaches, and Updated Therapeutic Strategies of the Syndromic Aortic Diseases: Marfan, Loeys–Dietz, and Vascular Ehlers–Danlos Syndrome (L Asta et all 2023) ;
- Frequency of de novo variants and parental mosaicism in vascular Ehlers–Danlos syndrome (A Legrand et all.2018) ;
- Phenotype of COL3A1/COL5A2 deletion patients (M kempers 2022) ;
- The type of variants at the COL3A1 gene associates with the phenotype and severity of vascular Ehlers–Danlos syndrome ;
- Vascular Ehlers-Danlos Syndrome: Long-Term Observational Study (M Franck 2019) ;
- Vascular Ehlers danlos syndrome and Pregnancy. A systematic review 2024 ;
- Molecular genetics and pathogenic of EDS (Ritelli 2020).
Pour plus de documents, n’hésitez pas à consulter le site du CRMVR rubrique : SEDV, bibliographie.